"L'art de la thérapeutique manuelle est ancien, et je tiens en haute estime ceux qui, siècle après siècle, l'ont perpétué jusqu'à nos jours."
Hippocrate, IVe siècle avant notre ère
L'art de soigner remonte à la nuit des temps. Le toucher est à l'origine même de l'acte thérapeutique, il a été le premier geste instinctif et empirique exercé sur un être vivant pour éradiquer le mal.
D'Asklepios, (Dieu de la médecine), à Ambroise Paré, (1509 - 1590, rebouteur et chirurgien empirique, père de la chirurgie moderne), on trouve toujours la trace de ces techniques indispensables au bon maintien du corps dans sa fonctionnalité naturelle.
Au début, chirurgies instrumentale et non-instrumentale sont liées, mais le temps amène leur séparation. Les Grecs et les Romains distinguent le médecin (celui qui soigne, de quelque manière que ce soit), et le chirurgien (ce terme s'applique d'abord à tous les métiers manuels). Déjà, le serment d'Hippocrate impose aux médecins de ne pas pratiquer la chirurgie : "Je ne pratiquerai pas l'opération de la taille, même sur ceux qui souffrent de la pierre ; je la laisserai aux gens qui s'en occupent. »
Il en est de même au Moyen-Âge. Pour la corporation des médecins, renforcée par la création des écoles de médecine au XIIIe siècle, l'acte chirurgical est humiliant, il relève des arts mécaniques. Ils laissent donc à leurs auxiliaires barbiers la pratique des actes manuels.
Au sortir du Moyen-Âge, les chirurgiens développent par la dissection leur connaissance du corps humain. Eux qui soignent par leurs mains, avec ou sans instruments, approfondissent ainsi les notions d'anatomie. Ce faisant, ils s'opposent aux médecins de la faculté, si cruellement moqués par Molière.
Nul n'est plus emblématique de cet art qu'Ambroise Paré, père de la chirurgie moderne, rejeté par la faculté parce qu'il était ancien rebouteur et ne parlait pas latin. Devenue toute-puissante en 1792 (à la suite de la fermeture des écoles de chirurgie), la médecine condamnera la chirurgie non-instrumentale à se perpétuer par tradition orale et à se réfugier dans les campagnes : ses seuls représentants seront alors les rebouteux.
De génération en génération, les rebouteux n'ont cessé de transmettre leur savoir-faire pour réparer les accidents articulaires du dos et des membres, des troubles de la digestion ou de la circulation sanguine, tous ces maux qui "empoisonnent" notre vie quotidienne.
Hommes des campagnes, ils étaient les médecins du monde du travail et n'étaient pas jugés sur des principes mais sur la seule efficacité immédiate, illustration du vieil adage : « Montre-moi ce que tu sais faire et je croirais en ta compétence ».
Ils ont exercé jusqu'à la deuxième moitié du XXe siècle et certains continuent encore de nos jours.